Les défis à l’horizon 2050

L’Union Internationale des Chemins de fer UIC, qui s’est réunie fin juin 2014 à Portorož en Slovénie, a publié un document stratégique intitulé «Challenge 2050». Le transport ferroviaire de marchandises, prospère dans différents pays et qui bénéficie d’une réputation de mode de transport plus écologique, a néanmoins du mal à maints endroits en raison du manque de cohérence à l’échelle internationale.

Le mode de transport ferroviaire regagne du terrain perdu.
Le mode de transport ferroviaire regagne du terrain perdu.

En 2014, la 84e assemblée générale de l’UIC s’est déroulée à un endroit historique. C’est en effet dans la ville de Portorož sur l’Adriatique que la décision fut prise, en 1921, de créer cette organisation multilatérale afin de poursuivre le développement du trafic ferroviaire international. Les 240 membres de l’organisation mondiale des chemins de fer représentant les cinq continents sont tout à fait conscients du fait que même au terme de 93 années de coopération il reste du pain sur la planche. Ils l’ont d’ailleurs prouvé par leur document stratégique «Challenge 2050». C’est que le trafic ferroviaire de marchandises ne fournit pas seulement des exemples de brillante réussite et de projets infrastructurels ambitieux, mais souffre aussi du manque de cohérence internationale et de la modernisation insuffisante à l’ère du numérique.

Les pays modèles

Les chemins de fer ont besoin d’espace. Le transport de marchandises par rail joue par conséquent un rôle plus important dans les pays plus vastes. En Australie, le rail achemine davantage de marchandises que la route et en 2013 1,2 milliard de t de marchandises ont pris le train en Russie. La Chine a de nouveau atteint en 2013 le niveau record de l’année précédente, à savoir 2,9 milliards de t. Aux États-Unis, l’Association of American Railroads vient de publier les chiffres du premier semestre 2014: 9,5 M. de wagons complets et 8 M. de TEU ont été transportés en trafic ferroviaire au Canada, aux USA et au Mexique. Les taux de croissance par rapport à 2013 sont de respectivement 2,3% et 5,8%.

Les superlatifs et records sont d’ailleurs fréquents dans ces pays. Au Canada, la longueur maximale d’un train de marchandises est limitée (pour des raisons de sécurité) à 3700 m, dans le cas de vracs à 3000 m. Les États-Unis ne connaissent pas ce type de restrictions: des «trains géants» de 295 wagons et plusieurs locomotives, d’une longueur totale de 5,5 km, y ont ainsi été testés avec succès. En Chine, des trains encore plus longs opéreraient régulièrement en trafic navettes entre Datong et Qinhuangdao (nord de Beijing).

Besoins de rattrapage ailleurs

Les pays émergents s’inspirent de ces exemples. De nombreux projets infra­structurels ambitieux portent sur le chemin de fer, surtout depuis environ une décennie. Pendant très longtemps, le rail a en effet été négligé en faveur de la route.

Le raccordement ferroviaire spectaculaire entre l’Orient et l’Occident a été inauguré fin 2013 (cf. ITJ Daily du 11.11.2013): le tunnel ferroviaire de Marmaray à Istanbul. La Turquie a d’ailleurs débloqué 3 milliards d’EUR pour d’autres projets de développement du réseau ferroviaire. L’Arabie saoudite compte, pour sa part, raccorder les différentes parties de son réseau et booste entre autres le North South Railway qui permettra de transporter des matières premières du nord vers les ports du golfe.

L’Inde se consacre depuis 2013 à la réalisation des «Dedicated Freight Corridors»: une ligne d’environ 1800 km réservée au fret qui reliera un jour le Pendjab au Bengale et une autre de 1500 km environ entre Mumbai et New Delhi. Quelque 13,5 milliards d’EUR sont prévus pour ces corridors nord-sud et ouest-est.

Les États africains misent sur des investisseurs étrangers pour développer leurs lignes fret. En mai 2014, des contrats avec la Chine ont ainsi été signés à Nairobi. Ils portent sur la construction d’une ligne vers Mombasa, vers le Ruanda et le Soudan du Sud. Deux autres grands projets concernent les liaisons de la région Moatize (Mozambique) jusqu’à la côte et d’Addis Abeba (Éthiopie) vers Djibouti. En même temps, la sud-africaine Transnet a lancé un projet de 18,8 milliards d’USD afin de développer des lignes fret pour le transport de matières premières.

Accorder ses violons en Europe

En Europe, où le réseau ferroviaire est relativement dense, l’UE a défini dès 2010 (dans le règlement 913) les trois principaux défis à relever dans le transport ferroviaire de marchandises: une coopération multilatérale plus étroite dans le cadre de la politique des infrastructures, un meilleur équilibre entre le transport de marchandises et de voyageurs et une amélioration de l’offre intermodale. Étant donné que l’on est actuellement encore très éloigné dans certaines régions d’un réseau intégré pour le transport ferroviaire de fret, neuf corridors fret seront développés en Europe. Les trois différents écartements de voie tout comme les cinq différents systèmes électriques et les sept différents systèmes de signalisation constituent pourtant encore de gros obstacles. Dans de nombreux pays d’Europe centrale et de l’Est, le recul du fret ferroviaire qui a débuté en 1990 n’est pas encore compensé. De premiers progrès sont enregistrés depuis fin 2013 sur le corridor menant du nord de l’Italie à Rotterdam. L’UE a pourtant encore fort à faire pour atteindre l’objectif fixé: transférer vers le rail, d’ici 2050, 50% du trafic fret entre les ports de mer néerlandais et italiens.     Christian Doepgen

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